Seconde peau, le vêtement en perspective

Avec les œuvres de Thierry Agnone, Yto Barrada, Hélène Bertin, Stéphanie Brossard, César, Marie-Ange Guilleminot, Vassilis Salpistis et Marie Voignier, en regard de costumes historiques issus des collections de l’association Petra Castellana.

Ouvert de 10h à 13h et de 15h à 18h30.
Tous les jours du 9 au 24 avril ainsi qu’en juillet et août, et du 22 octobre au 6 novembre.
Ouvert les mercredis, samedis, dimanches et jours fériés en dehors de ces périodes.
Billetterie à l’accueil.
Renseignements : 04 92 83 19 23

Pour cette seconde année de partenariat, le Frac Provence-Alpes-Côte d’Azur et la Maison Nature & Patrimoines de Castellane optent pour une exposition croisée, présentant des costumes des XIXe et XXe siècles de l’association Petra Castellana et des œuvres d’art contemporain de la collection.
Cette proposition permet d’aborder avec perspective une histoire des textiles en partant d’une période de rupture dans l’industrie du vêtement, le XIXe siècle, pour arriver à une appropriation de celui-ci par les artistes qui font de ses matières et de ses représentations le corps de leur travail.

Hélène Bertin, Fête, 2019

Petit précis d’Histoire. Durant la seconde moitié du XIXe siècle, le secteur du textile, dopé par les avancées techniques, le développement des transports particuliers internationaux et l’appétence des classes supérieures pour l’apparat, est en plein essor, appelé à devenir une industrie. Le terreau de ce temps est fertile, il va donner naissance à deux branches du vêtement, antagonistes pourtant complémentaires ; la haute couture et le grand magasin. La première attise le désir, diffuse son goût par le biais de la presse spécialisée et la seconde développe la disponibilité à travers un marché de produits manufacturés. Est ainsi consacré le phénomène de la mode.

En Provence, comme dans toutes les provinces de France, le goût parisien est connu ¹. La bourgeoisie rurale se l’approprie dans un premier temps et, de proche en proche, les paysans se dotent également de costumes au ton citadin réservés pour les grandes occasions en usant de confection artisanale, récupération, prêts… Néanmoins, la sélection présentée dans l’exposition démontre une persistance de la tradition provençale – formes, motifs, matériaux. Progressivement, les éléments de l’habillement traditionnel feront l’objet d’une folklorisation, relégués au rang de déguisement portés lors de fêtes populaires.

La seconde moitié du XXe siècle aura raison des costumes régionaux, adoubant la mode à la fois comme phénomène distinct et supérieur au vêtement et comme répondant à un système de valeur universel. C’est à ce niveau que les artistes se sont emparés du vêtement, l’isolant, le détournant, s’en jouant pour ainsi questionner les enjeux qui le traversent. Le corpus d’œuvres présenté esquisse un certain nombre de réflexions, certaines se répondant, se recoupant ou se complétant. Sur la société de consommation à travers les propositions de César ancrées dans les années 1960, fameuses compressions de biens manufacturés et celles, écho actuel, de Stéphanie Brossard sur l’épuisement des ressources. D’un pas de côté, Yto Barrada révèle le pendant clandestin des échanges conventionnels, ceux dits pauvres, dans sa vidéo La contrebandière, figure d’une travailleuse faisant commerce illégal de vêtement entre l’Espagne et le Maroc par nécessité.

Sur le rapport au corps qui se voit, par l’intermédiaire de l’habit, soumis aux règles d’une société patriarcale dont on retrouve dans l’œuvre de Thierry Agnone quelques restes : un tas de chaussures, aussi élégantes que blessantes. Pour Marie-Ange Guilleminot, la voie se trouve dans l’élaboration d’un costume unisexe, unitaille et hybride, il est parfois chapeau, parfois pull ou encore camisole. Il est le Chapeau-vie. Enfin, chez Hélène Bertin et Marie Voignier, on retrouve, dans deux expressions forts différentes, un intérêt porté au folklore et à la tradition populaire.

Bastien Sbuttoni
Assistant de diffusion