Cycle Opera Mundi au Frac

Prendre soin ? De l’attention à la vulnérabilité des mondes

Prendre soin – Cette huitième saison de conférences et ateliers d’Opera Mundi part d’un constat : les impacts du dérèglement climatique, la pandémie du Covid, comme les vacillements démocratiques de nos sociétés révèlent l’immense vulnérabilité de l’écosystème Terre et de l’organisation humaine du monde. Ces crises nous montrent aussi combien les niveaux d’interdépendances qui conditionnent l’habitabilité de la terre sont intriqués et menacés.

Renoncer à la puissance, pour une ville bienveillante

Vendredi 9 décembre
18h, Conférence inaugurale de Michel Lussault,
géographe.

Depuis des décennies, la plupart des politiques urbaines se sont construites autour du concept de métropole. Fondé sur des principes de puissance, d’attractivité et d’excellence, ce modèle de développement ambitionne de « tirer vers le haut » l’ensemble des territoires et profiter aux populations par ruissellement. Selon l’analyse de Michel Lussault, la pandémie a montré que cet édifice était d’une grande vulnérabilité.
Partant de ce constat, le géographe propose de transposer la théorie du Care de Joan Tronto à la question urbaine pour instituer un nouvel imaginaire qui serait celui de la « caring city », à construire dans la coopération entre tous les acteurs et actrices urbains.

Conférence suivie d’un Apero Mundi et introduite à 17h par une rencontre de restitution des Ateliers du soin et de l’attention qui se sont déroulés à Belsunce, à la Joliette et aux Baumettes en novembre et décembre en collaboration avec le LICA – Laboratoire d’Intelligence Collective et artificielle.

Réservation restitution des Ateliers Réservation conférence inaugurale

Frontière sociale, entre vulnérabilité et fragilité

Samedi 10 décembre
16h, Conférence de Guillaume Le Blanc,
philosophe et écrivain, professeur à l’Université de Paris. Tandis que nous faisons toutes et tous l’expérience de nos vulnérabilités cumulées, la référence à la vulnérabilité pour désigner les sujets que nous sommes ne fonctionne pas simplement comme une désignation neutre restituant un état d’expérience. Elle mobilise une philosophie du « prendre soin » selon laquelle le sujet désigné vulnérable est attendu de prendre soin de lui-même pour activer les soutiens de soin extérieurs. Une ligne de partage nouvelle s’établit entre fragilité et vulnérabilité. Si la fragilité est un concept « déficitaire » qui révèle une structure défaillante dans l’existence de quelqu’un, à l’instar d’un verre de cristal qui est fragile en raison de sa structure interne et qui peut comme tel se briser s’il tombe sur un sol dur, la vulnérabilité est un concept « capacitaire » qui suggère que la personne exposée à une possible blessure (« vulnus » en latin veut dire blessure) est encore en capacité de lutter contre ce qui le blesse. Ainsi pensons-nous que la personne au chômage, la personne malade sont vulnérables car elles doivent activer des compétences pour bénéficier d’un soin institutionnel extérieur.
Guillaume Leblanc propose d’examiner cette ambivalence du prendre soin à l’âge de la vulnérabilité en soulignant la frontière sociale entre vulnérabilité et fragilité pour réfléchir autrement à la nécessité d’un soin à l’égard de toutes les vies.

Réservation

Écoféminismes, sororité et partage

18h, Conférence de Fabienne Brugère,
philosophe, présidente de l’Université Paris Lumières.
Samedi 10 décembre Comment prend-on soin d’un monde que l’on perçoit de plus en plus vulnérabilisé et en danger ? L’expression même de « prendre soin » est-elle à la hauteur de ce qui nous arrive ? La vulnérabilité tient dans des violences : faites aux vivants humains et non-humains, aux sols, à la terre. Le « prendre soin » tient dans une attention devenue action par laquelle on se donne les moyens de réparer le monde, de le considérer en contrecarrant à la fois les logiques extrêmes d’extraction des ressources de la terre et de financiarisation des relations humaines. Des politiques de soin ou plutôt de « care » sont à développer dans des collectifs mais aussi à institutionnaliser pour déployer non plus une usure du monde mais un usage des mondes. La propriété (de soi, des autres et de la terre), pensée comme le marqueur de la modernité à travers l’individu souverain s’épuise et ne répond pas aux situations de vulnérabilité et d’interdépendance. D’autres modèles éthiques et politiques, issus du « care »/du soin s’inventent ici et là. Nous appuierons notre réflexion sur les mouvements écoféministes particulièrement vivaces dans le Sud (en Inde, en Amérique du Sud en Afrique) pour mettre en avant deux concepts : ceux de sororité et de partage.

Réservation

Les conférences seront suivies d’un Apero Mundi en présence de Michel Lussault et Guillaume Le Blanc.

Entrée libre. Réservation conseillée.